10 février 2023

Le Génie historique du christianisme

Un livre de Cyrille Schott

Conversation d’un père et de sa fille incroyante

Le Préfet Cyrille Schott est bien connu en Alsace. Né à Drusenheim dont son père Pierre a été Maire, il a eu une carrière préfectorale qui l’a amené aux quatre coins de l’Hexagone, après avoir été conseiller technique au cabinet de François Mitterrand. Il a notamment été préfet du Haut-Rhin entre 1994 et 1998. Il a terminé sa carrière comme Directeur de l’Institut national des hautes études de la sécurité et de la justice. Auteur de nombreuses publications et de plusieurs ouvrages à caractère politique, il a publié aux Éditions du Signe un ouvrage sous le titre « Le génie historique du christianisme ». Avec ce clin d’œil à Chateaubriand, Cyrille Schott précise d’emblée qu’il n’a pas l’orgueil de vouloir surpasser l’auteur du « Génie du christianisme ». Il précise aussi dans son avant-propos qu’il ne se veut ni évangélisateur, ni théologien ou philosophe.

La démarche de Cyrille Schott est originale, comme l’indique son sous-titre « conversations d’un père et de sa fille incroyante ». Le dialogue de l’auteur avec sa fille Justine, personnage fictif, rappelle la démarche catéchétique de Luther par question-réponse, mais l’échange porte ici sur toutes les grandes questions politiques et éthiques de notre temps : la guerre et la paix, la démocratie, la place des femmes dans la société et l’Église, la laïcité et l’athéisme, l’islam et le dialogue interreligieux. Chacun des 10 chapitres a pour titre un verset biblique. Car ce catholique assumé fait preuve d’une grande culture biblique et d’une réelle ouverture œcuménique : même s’il cite souvent les papes et leurs écrits, il embrasse l’ensemble des traditions chrétiennes dans leurs relations avec les grandes questions de notre époque.  Son propos est de montrer la contribution centrale du christianisme à l’ « aventure monde », tout en reconnaissant avec une grande honnêteté ses dérives passées et présentes, comme l’esclavage, le colonialisme ou la collaboration avec des régimes totalitaires.

Disons-le : le projet de l’auteur est apologétique et vise à montrer, non la supériorité du christianisme sur les autres religions ou convictions, mais sa contribution originale, unique, à l’histoire et à la civilisation mondiale. C’est un exercice risqué, qu’on ne pratique plus guère dans nos facultés de théologie. Mais c’est le mérite de l’auteur que de prendre sciemment ce risque, dans un contexte et une époque où le christianisme ne peut plus être soupçonné de vouloir imposer sa vision au monde. Et qui pourrait reprocher aux chrétiens de défendre le bien-fondé de la pertinence de leur foi pour eux-mêmes et pour l’humanité ?

L’ouvrage est placé sous l’égide, en couverture, du retable d’Issenheim : l’extraordinaire résurrection-ascension du Christ de Grunewald exprime de manière émouvante le message universel de l’Évangile, incarné dans une œuvre d’art géniale, créée en Alsace. Sans doute l’une des meilleures tentatives de représentation du mystère fondateur de la foi chrétienne : des stigmates de la croix à l’ascension, en passant par la transfiguration et la résurrection. Il n’y avait sans doute pas de meilleure illustration possible pour cet ouvrage original.

Une recension proposée par Christian Albecker